Alimentation intuitive : le témoignage de Juliette

Bienvenue dans ce nouvel article de mon podcast sur l’alimentation, « La pleine conscience du pouvoir ». Aujourd’hui, je vous propose de découvrir l’alimentation intuitive avec le témoignage de Juliette. Lorsqu’elle est partie en Angleterre pour ses études, Juliette s’est retrouvée face à la responsabilité de se nourrir seule. Une lourde responsabilité, tout à coup, pour cette jeune femme qui avait toujours, enfant, vu sa mère surveiller ce qu’elle mangeait. Elle est assez rapidement tombée dans le contrôle de ce qu’elle mangeait, pensant bien faire, en suivant des consignes de santé. Juliette a perdu beaucoup de poids sans s’en rendre compte, alors que ses proches s’alertaient. Sa mère l’a faite monter sur la balance lors d’un retour à la maison, et ça a été un choc pour Juliette, qui a très vite réalisé que quelque chose clochait. Cette prise de conscience a évité que cela aille plus loin et qu’elle mette sa santé plus en danger. C’est la rencontre avec l’alimentation intuitive qui lui a permis de déconstruire toutes les pensées de régime, liées à la restriction cognitive dans laquelle elle était tombée. Aujourd’hui, Juliette a à cœur de lutter contre toutes les injonctions de la culture des régimes, en particulier par le biais de son compte Instagram, @thelastquiche. Je vous laisse découvrir quel fut son parcours pour se réconcilier avec la nourriture.

« Dans ma famille, ma mère était au régime constamment. J’ai toujours connu ma mère en train de manger différemment de moi, de nous. J’avais vraiment l’impression que mon alimentation, c’était une grosse responsabilité et c’est comme ça que je suis tombée dans une bonne restriction cognitive, sans trop m’en rendre compte. »

« Contrôler mes repas, savoir quand je mangeais, qu’est-ce que je mangeais, etc., ça m’apaisait, en fait. Moi, franchement, je n’ai rien vu venir du tout, d’autant que je ne me pesais pas ! Quand je me suis pesée, j’ai vu le chiffre et j’étais à terre, parce que j’avais perdu plein de poids. J’ai pleuré et je me suis dit, vraiment : « Bon, on arrête les règles, etc. J’ai tout redéconstruit et en faisant ça, j’ai repris du poids. »

« Ça m’arrive, parfois, d’avoir des pensées parasites, mais la différence, c’est que maintenant, je les identifie et je sais lesquelles croire ou non. »

« Maintenant je me suis super alignée avec mon corps. Je sais que je lui donne ce qu’il veut, sans condition et sans jugement. Maintenant, je me mets plutôt moi au centre. »

Extraits du témoignage de Juliette

Dietculture dès l’enfance : une mère en régime permanent  

  • Merci d’avoir répondu présente pour partager avec nous ta découverte de l’alimentation intuitive grâce au témoignage de ta relation avec l’alimentation ! Est-ce que tu pourrais te présenter, pour commencer ?
  • Je m’appelle Juliette, je gère le compte Instagram thelastquiche, sur lequel je parle d’alimentation intuitive et de dietculture.
  • Sur ce compte, tu es vraiment là pour… j’ai envie de dire militer, n’est-ce pas ? Je ne sais pas si le mot te convient ?
  • Oui, oui ! Tu peux dire militer ! C’est vrai que c’est un engagement, de lutter contre la culture des régimes, etc. Avec d’autres comptes sur Instagram, on commence à se structurer pour avoir un message commun et que ça touche le plus de monde possible.
  • Ce compte, c’est l’aboutissement de ton histoire en fait, n’est-ce pas ?
  • Oui, c’est ça !
  • Pourrais-tu maintenant nous partager cette histoire ?
  • Je n’ai pas eu de problème avec la nourriture jusqu’à mes années étudiantes. Dans ma famille, ma mère était au régime constamment. Depuis que je suis née, même avant, elle avait un rapport très troublé avec l’alimentation, parce qu’elle était un peu ronde, si bien qu’elle a subi pas mal de remarques quand elle était jeune. Ces remarques ont fait qu’elle s’est mise à faire des régimes hyper tôt, vers à 14 ans. Il y avait des périodes où elle ne mangeait quasiment plus… avant de recommencer. Ça a duré quelques mois comme ça. Elle a eu des périodes de boulimie, d’hyperphagie, etc. Elle était confrontée à ce problème courant, qui est de penser que ce qui allait réguler son poids, c’est de faire des régimes. Elle a donc fait pas mal de régimes, pendant des années. Actuellement, ma mère est d’ailleurs toujours dans un régime. Elle a 60 ans maintenant et elle compte encore ses calories. Elle a fait pas mal de programmes différents, mais celui qui l’a le plus marquée c’est WeightWatchers©, qu’elle a fait quand j’étais jeune. J’ai donc toujours connu ma mère manger différemment de moi, de nous, sans que je comprenne trop pourquoi elle faisait ça… C’est « drôle » : je me souviens que, lorsque j’étais petite et que nous mangions par exemple, des pâtes avec de la sauce, elle, elle mangeait des pâtes blanches, sans sauce. Moi, je m’amusais, à prendre une pâte, à sucer la sauce autour, puis à dire : « Ah ba voilà, je mange comme Maman ! » Elle a toujours été dans ce rapport-là, très conflictuel avec son image, son poids, etc. Elle faisait pas mal de crises d’hyperphagie. Cependant, j’ai vécu dans ce contexte, certes, mais sans qu’elle reporte ses angoisses sur moi. Elle ne m’a jamais dit « il faudrait que tu fasses un régime », elle ne m’a jamais influencée de ce côté-là. Ce fut même elle la première de mon entourage à dire que les régimes, au final, ce n’était pas bien pour elle, qu’elle souffrait de sa relation avec la nourriture, etc. Elle a donc toujours été consciente que les régimes, même si elle en avait fait plein, n’étaient pas des solutions à son problème, parce que celui-ci était plus profond. Je pense qu’elle aurait besoin de bénéficier d’une thérapie en fait, mais elle n’a jamais vu de thérapeute. Toutefois, j’ai grandi dans ce contexte-là, sans pour autant remettre en question ma façon de manger. Je mangeais déjà de tout, je n’ai pas de préférence alimentaire très marquée, type « je n’aime pas ci, je n’aime pas ça ». Globalement j’aime tous les aliments. Je n’avais pas un rapport conflictuel avec mon corps non plus, je m’en fichais un petit peu même, à dire vrai.

Les études en Angleterre : les débuts de l’oppression des règles

  • J’ai grandi et quand je suis devenue étudiante, je suis partie 2 ans en Angleterre. Je n’ai pas eu trop de soucis pendant la première année. Par contre, durant la seconde, j’étais un peu plus isolée, car ma relation avec ma coloc s’était compliquée. Avant, on mangeait ensemble mais lors de la deuxième année, je me suis retrouvée à faire mes repas seule, de même que mes courses. Je me souviens que ça m’angoissait pas mal. J’ai l’impression que je perdais un peu pied : ma famille était loin, je me sentais seule… Je pense que j’avais besoin de contrôler quelque chose. C’est comme ça que je me suis mise à me poser des questions sur mon corps, à me dire : « si ça se trouve, ma façon de manger n’est pas idéale. Peut-être que je devrais opérer certains changements… » Je trouvais que je n’avais pas un ventre très plat, donc j’ai commencé à me dire qu’il fallait que je fasse des ajustements, etc. Je me suis abonnée à tous les comptes « healthy » que je trouvais sur Instagram. J’ai commencé à regarder des hashtags de rééquilibrage, etc. Du coup, j’ai passé en revue toutes les règles de rééquilibrage du type : « Il faut moins manger le soir, il faut manger plein de légumes… » Ça a commencé à m’influencer. J’avais vraiment l’impression que mon alimentation, c’était une grosse responsabilité, notamment parce que j’entendais beaucoup parler « d’alimentation-santé ». Je vivais toute seule, donc je me disais vraiment : « Il faut que j’apprenne à bien manger, parce que c’est hyper important ». Ce genre de règles prenait de plus en plus de place dans mes pensées, je suis tombée dedans, je les ai appliquées. C’est comme ça que je suis tombée dans une bonne restriction cognitive, sans trop m’en rendre compte. Je ne me pesais pas du tout à l’époque – même maintenant d’ailleurs. Je restreignais certains aliments, car je savais qu’ils n’étaient « pas bien ». Certains aliments étaient « meilleurs » que d’autres, donc il fallait les favoriser : je mangeais beaucoup de légumes ; pour le goûter, je favorisais la pomme plutôt que la barre chocolatée, parce que la pomme c’est bien, etc.
  • En fait, tu es passée d’un rapport complètement naturel, où tu ne posais plus de questions, à une période où ça devenait une grosse responsabilité de te préparer à manger. Cela étant en lien avec un moment où tu te trouvais un peu seule, un peu isolée. Tu n’as plus vu ton corps de la même façon non plus… et tu as cherché des guides, des repères. Tout à coup, ce n’était plus ton intérieur qui te guidait, mais toutes ces règles.
  • C’est ça. Avant, je faisais vraiment confiance à mon corps, je mangeais intuitivement de base. Puis j’ai détraqué mon comportement alimentaire en suivant des règles extérieures. Je faisais plus confiance à ce que je lisais dans des blogs qu’à mon propre corps… Mais je pense que j’avais besoin de ça, c’était comme une béquille pendant cette période où j’étais en Angleterre, où j’étais seule, etc. Je pense que je ressentais une anxiété assez diffuse, si bien que contrôler mes repas, savoir ce que je mangeais, en quelle quantité, etc., ça m’apaisait.
  • Ça venait rassurer quelque chose en toi.
  • Exactement, mais bien sûr je ne l’ai compris que plus tard. Au début, je ne pensais pas forcément que c’était mal ce que je faisais, car on baigne vraiment dans cette culture du régime, du rééquilibrage, pleine de « il faut manger comme ci, il faut manger comme ça ». Du coup, je pensais vraiment que j’agissais pour mon bien… alors que pas vraiment, en fait. Au final, ce n’est pas moi qui l’ai remarqué, mais ma mère. Forcément, avec son passé plein de régimes et de troubles du comportement alimentaire, quand je suis revenue en France pour les vacances, elle a tout de suite vu que j’avais maigri. Moi, honnêtement, je n’avais rien vu, mais vraiment rien vu du tout ! En plus, je ne me pesais pas. J’étais en mode « Ba non, je n’ai pas maigri… » Je sentais que je flottais dans mes vêtements, mais ça m’inspirait seulement des pensées qui ressemblaient à : « Oh oui… Bon peut-être que je me suis un peu affinée, mais bon, ça ne doit pas être un gros chiffre, je ne pense pas ». J’avais commencé à faire du sport, du cardio surtout, pour me déstresser. J’avais augmenté l’activité physique, diminué les apports, donc forcément cela a engendré une perte de poids. Mais moi, je n’ai pas vu tout cela tout de suite. Quand je suis revenue, ma mère a eu peur que je sois anorexique. Mais je mangeais, et je lui disais : « Mais non, je mange, il n’y a pas de soucis. » Mais ça se voyait quand même, que je mangeais de moindres quantités. Ça a commencé à l’inquiéter, si bien que ça m’a inquiétée moi aussi, du coup. Ma sœur fut un peu choquée aussi lorsqu’elle m’a vue… J’ai donc commencé à me poser des questions. « Mais pourquoi tout le monde s’inquiète comme ça ? » Au début, j’étais presque vexée, mais ça a comme « planté des graines de réflexion ». Quand je suis revenue aux vacances suivantes, ma mère m’a clairement dit : « Va te peser ! » Donc je me suis pesée et quand j’ai vu le chiffre, j’étais à terre, parce que j’avais vraiment perdu plein de poids ! Je faisais un poids que je n’avais jamais fait, ou alors vraiment que j’étais enfant… Ça m’a choquée à un point tel que j’en ai pleuré. Là, vraiment, je me suis dit que quelque chose clochait.
  • Je trouve ça incroyable, le fait que tu ne t’en rendais pas compte en regardant ton corps. Tu constatais qu’il s’affinait, que les vêtements devenaient trop grands… mais il y avait comme une espèce d’inconscience de la transformation de ton corps.
  • Oui, et comme en plus j’appliquais des règles extérieures, je n’étais plus connectée avec moi-même. Je n’étais pas connectée avec mon corps, mais je n’étais pas connectée non plus avec mon image, c’est pour ça que je n’ai pas vu à quel point j’avais maigri.
  • C’est intéressant, cette précision, de ne pas être non plus connectée à l’image. Ça ne venait pas se relier à la conscience réelle de l’apparence. Ça a donc été un choc, de voir ce chiffre sur la balance ?
  • Ah oui oui ! Je me suis sentie trahie en fait, trahie par mon corps. Je me demandais comment il avait pu me laisser faire ça ! J’ai été vraiment choquée et ça a été mon déclic. C’est là que j’ai réalisé que quelque chose clochait. « Je ne dois pas manger assez… » Pourtant, j’avais l’impression ! Mais non, en fait. Quand on s’oblige à remplacer les aliments sucrés par des pommes, on se prive inconsciemment. Pour les quantités, c’était pareil : je me privais inconsciemment.
  • Si je comprends bien, en fait, tu ne vivais pas ça comme de la privation ? Tu suivais les conseils, parce que c’était « bon pour la santé », mais je n’ai pas l’impression que tu vivais dans la frustration. N’est-ce pas ?
  • Non, pas vraiment. Je pense que c’est pour ça, d’ailleurs, que, lorsque j’ai recommencé à manger normalement, je n’ai pas eu de compulsions pour les aliments sucrés ou autre. Je me les autorisais quand même, pendant la période de restriction. C’est surtout sur les quantités que je jouais. Je diabolisais plus des quantités que des catégories d’aliments. Il y avait un mixe de règles pour être exact, mais il y avait beaucoup de contradictions !
  • Tu avais créé tes propres règles, en fait ?

Alimentation intuitive : le témoignage de réapprentissage de Juliette

  • Oui, c’est ça. Je n’ai pas suivi de rééquilibrage ou de régime à la lettre. C’était un mixe de ce que j’avais pris sur le blog d’untel, sur l’Instagram d’untel, etc. Au final, j’avais créé tout un carcan de contraintes.
  • … Mais de contraintes à ta sauce, d’accord. Et donc, après le choc de ce chiffre sur la balance ?
  • Ma mère m’avait passé tous ses livres de diététiques, et dans le lot, il y avait le livre de Jean-Philippe Zermati, « Maigrir sans régime ». Je trouvais le titre racoleur, mais je l’ai lu et j’ai réalisé être en phase avec ce qu’il y expliquait : écouter sa faim, revenir aux signaux du corps, ne pas suivre les règles extérieures, les règles de la culture du régime, etc… Au final, c’est de cela dont il parle. Je me suis donc dit que, manifestement, je ne mangeais pas assez et qu’il fallait que j’écoute plus mon corps. Je n’avais pas vraiment l’impression de me restreindre, mais en même temps je savais bien que je ne pouvais pas être arrivée à un tel poids sans dérèglément. Je savais bien aussi, quelque part en moi, que je ne mangeais pas complètement à ma faim. Je respectais par exemple les règles comme : « il faut manger peu le soir, et pas de féculent », donc j’avais régulièrement faim la nuit. Ça ne me réveillait pas forcément, mais je me réveillais quand même très tôt, en ayant très faim… Avec le recul, je réalise combien je me sous-nourrissais. Il y a eu beaucoup, beaucoup de soirées où je me suis endormie avec la faim au ventre, ou au minimum sans être rassasiée. Me dire tout cela à moi-même, ça a fait « tilt » et j’ai commencé à vraiment me renseigner sur le discours de Zermati, sur le GROS, c’est-à-dire le groupe de réflexion sur l’obésité et le surpoids, qui défend l’idée de manger intuitivement et le fait que le corps a un poids de forme, qui n’est pas forcément celui qu’on voudrait faire, mais qu’en écoutant ses signaux on y revient naturellement, etc. Avec toutes ces lectures, avec les vidéos d’Elyane C sur l’alimentation intuitive aussi, je me suis dit : « OK, faut vraiment que je mange à ma faim. Mais vraiment à ma faim, sans jugement. » A suivi tout un cheminement de déconstruction, pour revenir à la « moi d’avant », puisque je savais que je mangeais intuitivement au lycée et avant. J’ai cassé les barrières, j’ai petit à petit écarté les règles pour m’écouter. Si j’ai envie de manger des pâtes le soir, j’en mange et si c’est une grosse plâtrée, et bien c’est une grosse plâtrée. La pomme, certes c’est bien, mais si je n’ai pas envie de pomme, je n’en mange pas, etc. J’ai tout déconstruit, et se faisant j’ai repris du poids. J’ai repris du poids assez facilement, mais ça m’a pris quelques années quand même.
  • J’ai l’impression en t’écoutant que ça n’a pas été si compliqué que ça, de déconstruire ces règles que tu t’étais construites. Ça a l’air assez fluide.
  • Ce qui est bien, c’est que cette période d’alimentation troublée n’a pas duré trop longtemps. Ma mère l’a vu assez vite. Je pense que si elle n’avait pas mis de warning si tôt, je serais allée plus loin, jusqu’à réellement tomber dans l’anorexie. En reprenant du poids, je n’ai pas eu de problème de compulsion ou autre. J’ai eu des épisodes de faim plus intense, mais je trouvais ça normal, puisque, même si ce n’était pas de l’anorexie, ça y ressemblait beaucoup malgré tout. Je parle plutôt d’alimentation troublée, parce que je ne rentre pas complètement dans les cases des TCA, mais il y avait un peu d’orthorexie, un peu d’anorexie, etc. Comme j’avais lu pas mal de contenus informatifs sur les troubles du comportement alimentaire, j’étais préparée, j’avais accepté le fait que j’allai connaître des moments où j’allai avoir pas mal faim et qu’il faudrait que je me donne à manger pour retrouver mon poids de forme.
  • Dans ce que tu dis, je trouve intéressante cette notion de durée. Cela dit, tu aurais pu tomber dedans en peu de temps, il n’y a pas de règles, cela varie selon les personnes. Mais, dans ton expérience à toi, ces notions de durée, de choc, ainsi que la présence de ta mère et des proches en général, t’ont permis de renverser la balance assez… je ne vais peut-être pas dire « facilement » parce que ce n’était sans doute pas facile, mais en tout cas ça t’a permis de le faire. C’est un chemin que tu as fait seule du coup, en regardant des contenus sur Internet, en lisant des livres, en travaillant sur toi-même, avec cette déconstruction, brique par brique, de toutes ces règles… Qu’est-ce qui a été facilitant pour toi, ou au contraire pas facilitant, pendant cette période ?
  • Ce qui m’a aidé, c’est tout le contenu disponible quand on se renseigne sur le GROS, par le biais des livres de Jean-Philippe Zermati, de Gérard Apfeldorfer également, qui est l’un de ses collègues. Tous les comptes que j’ai pu consulter sur Instagram, autour de l’alimentation intuitive, m’ont aidée aussi. Il s’agit beaucoup de contenus anglophones, car le concept vient des nutritionnistes Evelyne Tribole et Elyse Resch, qui sont américaines. J’ai l’impression que ça s’est plus développé là-bas. En tout cas j’ai le sentiment qu’on en parle différemment en France. Comme ça va à l’encontre du discours ambiant de la dietculture, c’est difficile de trouver ces contenus en français et de ne pas être parasitée par la culture des régimes. Je pense que c’est une des difficultés que j’ai rencontrées : la culture des régimes est tellement omniprésente ! Ça va de la petite remarque de la copine à la pub à la télé, c’est présent partout. Je trouve que c’est vraiment ça le plus difficile, c’est de couper la « radio dietculture ».
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La dietculture : omniprésente dans notre société

  • Je suis d’accord, et ce d’autant plus quand elle a été internalisée, finalement, et que le discours est présent à l’intérieur de notre esprit. Toi, riche de tes connaissances sur l’alimentation intuitive et de ton témoignage, comment tu la définirais, cette culture des régimes ? Comment tu résumerais ce concept-là ?
  • Pour moi, la culture des régimes, c’est un système de croyances qui touche toutes les sphères de la société, que ce soit le cercle familial, l’éducation, les médias, etc. Ces croyances érigent la minceur comme un Graal : être mince équivaut à toutes les vertus du monde. Ce culte de la minceur entraîne une peur de grossir, cette grossophobie ambiante. Grossir, c’est forcément mal, c’est forcément un échec, si bien qu’il faut tout faire pour l’éviter. Ensuite, je dirais que ça regroupe toutes ces croyances autour du fait qu’on doit contrôler notre alimentation et que, en somme, notre corps est incapable de se réguler tout seul et que si on l’écoutait, on mangerait n’importe quoi. Ainsi, ce qu’il est bien de faire, c’est de suivre des règles nutritionnelles, les recommandations, les pensées de rééquilibrage. C’est quelque chose, comme nous disions, dans lequel on baigne complètement. Une fois qu’on reconnaît ce culte de la minceur, cette grossophobie, ce contrôle excessif de l’alimentation – et du corps en général aussi, par le biais du sport, par exemple – on réalise alors à quel point cette culture est partout. C’est difficile de s’en préserver et tout un travail de déconstruction, qui ne se réalise par du jour au lendemain, peut être nécessaire pour s’en libérer. Ça m’arrive encore, d’avoir des pensées parasites, tout n’est pas totalement déconstruit, mais la différence c’est que maintenant, je les identifie et je sais lesquelles croire ou non. Je suis capable de faire preuve de discernement. Avant, lorsque quelqu’un énonçait une règle nutritionnelle, je la prenais plus facilement au pied de la lettre, ou je me questionnais sur mon comportement. Maintenant, je me fais confiance et je sais que les règles sont assez néfastes, car elles brouillent notre relation à notre alimentation, à notre corps. Elles brouillent les signaux qu’il nous envoie, ainsi que notre capacité à les identifier, à les comprendre et à y répondre. On utilise souvent le terme de « cheminement » pour désigner ce travail de déconstruction et je pense que c’est vraiment le mot. Ce n’est pas un long fleuve tranquille, mais à la fin on gagne toute une liberté et tout un alignement, une paix, entre son corps et soi-même. Je me sens très alignée avec moi-même, je sais que je donne à mon corps tout ce qu’il demande, sans condition et sans jugement. Je me sens vraiment apaisée et je sais que, maintenant que j’ai eu cette expérience-là, je ne pourrais pas recommencer à m’imposer des règles et à écouter bidule qui parle de tel régime plutôt que moi-même. Je me mets moi-même au centre.
  • Maintenant, ça vient vraiment de l’intérieur de toi. J’aime beaucoup ce que tu dis, sur le fait d’écouter ton corps, qui a su, puis qui n’a plus su, pollué qu’il était par toutes ces injonctions extérieures, jusqu’à ce qu’il retrouve ça et que tu respires enfin pleinement. C’est marrant, je fais à l’instant le rapprochement avec ce que je peux partager avec les parents que j’accompagne. J’ai accompagné beaucoup de parents dans ma vie professionnelle, et j’en accompagne encore. Souvent, j’échange avec eux autour du fait qu’ils savent ce qui est bon pour leur enfant et pour leur famille. Certains sont tellement pollués par les « il faut », les « vous devriez », etc. De même que pour les règles sur l’alimentation, ça peut être blanc un jour et noir le lendemain… On entend tout et son contraire. On peut par exemple citer les discours changeants tels que : « il faut coucher bébé sur le ventre… ah ba non, sur le côté… ah ba non finalement sur le dos ». Tout comme on peut entendre : « il ne faut pas manger de féculents le soir… ah ba si, il faut en manger ». Il faut plutôt faire ceci, il faut plutôt faire cela : ces règles contradictoires sont perpétuelles. Au final, j’ai l’impression que ça concerne tellement de choses, en ce qui nous concerne nous, êtres humains, que nous n’arrivons plus à écouter ce qui est bon pour nous d’une manière générale. Nous écoutons ce que l’extérieur nous dit. C’est vraiment cela, l’expérience que tu as faite.
  • Oui ! Je pense aussi que, lorsqu’on est perfectionniste, qu’on veut toujours faire de notre mieux, mais peut-être un peu trop, alors nous sommes plus exposés à l’influence de ce genre de règles. Tu parlais d’éducation et oui, je te rejoins. C’est le même problème : au lieu de se faire confiance pour répondre aux besoins de son enfant, on a tendance à écouter la règle dans le manuel.

Aujourd’hui : une alimentation intuitive au gré d’un cheminement perpétuel

  • Aujourd’hui, tu dirais que tu en es où, Juliette, dans ton rapport avec l’alimentation ? Tu nous as dit que c’est quelque chose qui est derrière toi, en tout cas c’est ce que j’entends. Tu nous as confié que tu penses qu’il n’y a plus de risque de « te faire avoir ». Où est-ce que tu dirais que tu en es, aujourd’hui ?
  • Je dirais qu’aujourd’hui, après avoir fait tout ce travail, il me reste malgré tout quelques idées reçues à déconstruire, car ça m’arrive encore d’avoir des petites pensées parasites. Il y a toujours des sujets qu’on aborde avec un angle différent du sien. C’est le cas pour la grossophobie par exemple. Même si j’en prends de plus en plus conscience, au travers de la peur de grossir notamment, je pense qu’il y a encore des points au sujet desquels, dans un an, je me dirais : « ah mais oui, à l’époque ça, je trouvais ça normal… » Je pense qu’on a toujours une marge de manœuvre pour continuer à avancer. En ce qui concerne la dietculture, je pense que c’est vraiment un processus permanent, que d’apprendre à ne pas l’écouter. Il y a des moments où on arrive bien à s’écouter, d’autres où on a l’impression qu’on ne fait pas ce qu’il faudrait, alors que si… Disons que ce sont des petites briques, que l’on rajoute au fur et à mesure de son chemin. Mais tant qu’on est dans cette démarche de s’écouter et de manger intuitivement, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise manière de le faire. Malgré tout, je sais que ça m’arrive encore de me juger, tout en étant consciente qu’il n’y a pas de raison. Je trouve que la bienveillance envers soi, la flexibilité envers soi-même, c’est quelque chose qui se travaille tout le temps. On n’a jamais vraiment fini ce travail-là. Je pense que cela s’applique aussi au rapport au corps. Sur ce sujet-là, je suis encore en train de déconstruire beaucoup d’idées reçues. Il y a des jours où on se sent bien dans sa peau, d’autres moins. Moi je dirais que tant qu’on est dans ce chemin-là, on est sur la bonne voie. Ceci étant, ça peut arriver qu’on ralentisse un peu, entre guillemets, ou qu’on butte sur un petit caillou.
  • L’idée, dans ce processus-là, c’est aussi de ne pas retomber dans la quête de perfection, dans le « je dois et je devrais »… Je suis bien d’accord avec toi ! C’est vraiment un processus et l’objectif, ou l’idéal, même si je n’aime pas ce mot-là, disons plutôt le phare, c’est la flexibilité et l’écoute de soi.
  • Tout à fait. Quand j’ai commencé à me renseigner sur l’alimentation intuitive, au début, j’étais trop perfectionniste. Je pense que c’est un de mes traits de caractère ! J’ai d’ailleurs fait un live sur mon compte Instagram, au sujet des erreurs que j’ai commises quand j’ai commencé l’alimentation intuitive. L’une de ces erreurs, c’est vraiment ce qu’on dit là : c’était ce côté « trop rigide » dans son écoute de soi. N’écouter que sa faim, que son rassasiement, vouloir toujours, tout le temps être dans l’écoute et vouloir bien faire, etc. Au final, comme on dit : le mieux est l’ennemi du bien. Je pense que, même dans l’alimentation intuitive, si on applique ce principe de « performance », ça ne fonctionnera pas. On restera dans ce carcan de « bien et mauvais », cette pensée manichéenne qui nous suit partout… alors que non, manger intuitivement c’est vraiment ne plus juger ce qu’on fait.
  • Avant qu’on se quitte, Juliette, j’aimerais que tu nous reparles plus en détails de ton compte Instagram, thelastquiche, et de ton intention avec ce compte. Qu’est-ce que tu souhaites transmettre comme message pour le futur, par le biais de ce compte ?
  • Ce compte, je l’ai créé il n’y a pas si longtemps : c’était fin octobre, au début du deuxième confinement. Comment et pourquoi je l’ai créé ? J’utilisais déjà Instagram, sur lequel j’ai un autre compte, que j’ai gardé même si je publie beaucoup moins dessus qu’avant. Je découvrais l’alimentation intuitive et, avec mon expérience, tout le travail que j’ai effectué sur moi-même, tout le contenu que j’ai consommé sur le sujet, etc. : j’ai réalisé que j’étais frustrée de ne pas partager cela, de ne pas parler de mes pensées et de mon cheminement. Je me suis donc simplement dit que ce serait bien si je faisais un compte Instagram dans ce but. Au moment de sa création, cela faisait déjà depuis de nombreuses semaines que j’avais cette idée en tête, mais il faut passer par ce moment où ça y est, on ose. J’avais même fait un mémo sur mon téléphone, avec des idées de nom pour le compte, etc. Et puis j’ai fini par arrêter d’attendre le « meilleur jour » et je l’ai créé ! Comme j’ai plein, plein d’idées de contenus, j’ai beaucoup publié. J’ai fait de belles rencontres aussi. Le but, c’est de parler de l’alimentation intuitive et surtout, de contrer la dietculture en tenant un contre-discours. J’ai bien conscience, et je pense qu’on commence à en avoir tous conscience, que la culture du régime est vraiment partout, partout, partout et mon objectif c’est vraiment de participer à déconstruire ça. C’est d’ailleurs la présentation de mon compte : démonter la culture des régimes pour ne pas être prise pour la dernière des quiches… Le nom vient de là : je voulais être la dernière quiche à m’être faite entuber par la culture des régimes. Donc voilà, ma volonté, c’est d’être un fer de lance contre la culture du régime, de déconstruire tout ce qu’on voit sur les rééquilibrages, de déconstruire toutes les pensées qu’on nous met dans la tête, toutes les phrases et remarques des gens autour et à la télé. J’ai envie d’aider toutes les femmes, et les hommes aussi, qui sont dans cette démarche de se libérer de ces chaînes de la dietculture, de les soutenir, de leur parler de moi, de mon expérience, etc. Honnêtement, si mon compte peut aider au moins une personne, j’ai tout gagné.
  • Il y a une réelle idée de transmission, de contribution à cette dynamique, d’être une des pierres qui viennent déconstruire ces croyances, ces idées que nous nous sommes toutes et tous mis dans la tête. C’est un sacré combat et je pense qu’il y a du boulot pour un petit moment encore !
  • C’est sûr !
  • Je te remercie pour être venue me parler de ton expérience et pour nous avoir partagé ta fougue dans ta volonté à transmettre ton message ! Je pense particulièrement aux plus jeunes d’entre nous, qui se font plus facilement avoir… Je le vois avec les jeunes générations, qui ont l’âge de ma fille, qui ont grandi avec les réseaux sociaux et qui se prennent tout ça dans la figure en permanence… Donc je trouve génial que des comptes comme le tien se multiplient et contribuent à détruire ça. Vraiment : merci Juliette !

Merci d’avoir écouté cette mise en avant de l’alimentation intuitive et ce témoignage jusqu’au bout. J’espère que le partage de Juliette vous a inspiré et pourra vous permettre de mieux lutter contre la dictature des régimes et de la minceur. Vous pouvez également retrouver Juliette via son site internet sur lequel elle propose divers contenus sur le sujet de l’alimentation intuitive, ainsi que des accompagnements. Si vous souhaitez, vous aussi, venir contribuer dans ce podcast sur l’alimentation en partageant votre histoire, votre vécu compliqué et comment, si tel est le cas, vous avez pu vous réconcilier avec la nourriture : n’hésitez pas à me contacter via mon compte Instagram, ou via mon site internet. N’oubliez pas d’encourager le podcast en le partageant autour de vous, en vous abonnant, en lui donnant une note 5 étoiles sur Apple Podcast et en me laissant un avis ! À très bientôt pour un nouvel épisode de « La pleine conscience du pouvoir ».

2 Responses

  1. Bonjour,
    Merci pour ce podcast.
    Il amène à réfléchir..
    Je me pose moi moi-même des questions car j ai grossi avec ce confinement…

    1. Merci Alice pour ce commentaire. Il me semble complètement normal de prendre du poids dans les périodes où nous bougeons peut-être moins, sommes plus souvent assises… et vivons des émotions parfois compliquées… la bienveillance envers nous-mêmes dans ces moments là, et l’acceptation de nos hauts et de nos bas, peut nous permettre de traverser ces périodes bien plus sereinement… et lorsque le cours plus “normal” des choses reprendra, il n’y a aucune raisons que notre corps ne bouge pas de nouveau 😊

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