Qu’est-ce qu’un TCA ? Définition + 10 idées reçues | Avec Camille Ringot, du compte doc.tca

Dans ce nouvel article de mon podcast « La pleine conscience du pouvoir », j’ai la chance de recevoir Camille Ringot, qui est médecin psychiatre et addictologue spécialisée dans les troubles des conduites alimentaires. Ensemble, on va répondre à une question à la fois simple et compliquée : qu’est-ce qu’un TCA ?

Camille est l’auteur du livre « Jeûne, régime, minceur, la grande manipulation », aux éditions Larousse. C’est aussi la créatrice du compte Instagram @doc.tca (que je vous encourage à découvrir si ce n’est pas déjà le cas !).

Dans cet article, nous vous proposons une définition des maladies psychiatrique que sont les troubles du comportement alimentaires (TCA), ainsi qu’une présentation des troubles principaux et de leurs symptômes : anorexie mentale, boulimie nerveuse et hyperphagie boulimique. Enfin, je vous propose de faire le point sur 12 idées reçues trop répandues…

Qu’est-ce qu’un TCA ? | La définition médicale

Si vous connaissez mon podcast « La pleine conscience du pouvoir », vous savez que la frontière entre une « simple » relation troublée à l’alimentation et un trouble des conduites alimentaires (TCA) n’est pas toujours simple à diagnostiquer.

Camille Ringot étant médecin psychiatre et addictologue spécialisée dans les troubles des conduites alimentaire, j’ai profité de sa venue pour commencer par lui demander une définition.

Alors, qu’est-ce qu’un TCA, en quelques phrases ?

« Les troubles des conduites alimentaires, il faut rappeler que ce sont des maladies psychiatriques, diagnostiquées par des médecins. »

Il s’agit de maladies psychiatriques graves, répertoriées dans des manuels de diagnostic psychiatrique. Elles se caractérisent par une relation perturbée avec l’alimentation, entraînant une souffrance psychique et souvent physique.

« Ce ne sont pas des caprices, ni une question de volonté, mais bien des maladies. »

Quels sont les principaux troubles du comportement alimentaire et leurs symptômes ?

En tant que médecin psychiatre, Camille a identifié durant notre échange 3 principaux types de TCA :

  • l’anorexie mentale ;
  • la boulimie nerveuse ;
  • et l’hyperphagie boulimique.

L’anorexie mentale est sans doute le plus connu des TCA… et donc, nous le verrons plus loin dans cet article, celui qui accumule le plus d’idées reçues !

« L’anorexie mentale se définit par des restrictions alimentaires, une perte de poids en conséquence, et une peur intense de prendre du poids. »

Camille nous présente ensuite la boulimie nerveuse (qui, contrairement aux idées reçues, n’est pas forcément vomitive) :

  • crises d’hyperphagie récurrentes ;
  • sentiment de perte de contrôle durant les crises ;
  • comportements compensatoires (tels que vomissements, hyperactivité, jeûne…).

« La boulimie nerveuse, ça se définit par le biais de crises d’hyperphagie qui vont être répétées, donc des crises de boulimie, on appelle ça aussi comme ça. C’est des moments de perte de contrôle où on va absorber une quantité très importante d’aliments sur un court laps de temps. [Elles] vont se répéter […]. Ça peut être tous les jours, plusieurs fois par semaine, pendant plusieurs semaines, plusieurs mois. »

Enfin, Camille nous a présenté l’hyperphagie boulimique, qui se caractérise par :

  • de crises d’hyperphagie sans comportements compensatoires ;
  • une prise de poids progressive, souvent associée à l’obésité.

« L’hyperphagie boulimique, c’est le trouble alimentaire le plus fréquent, mais aussi le moins connu, caractérisé par des crises d’hyperphagie sans comportements compensatoires […]. Parmi tous les troubles alimentaires, c’est celui qui, au niveau de la proportion homme-femme, va toucher aussi plus d’hommes que les autres troubles alimentaires. Ce n’est pas moitié-moitié, mais presque. »

Qu'est-ce qu'un TCA ? Définition + 10 idées reçues

Un diagnostic de TCA est-il simple à poser ?

Cependant, attention : répondre à une question telle que « Qu’est-ce qu’un TCA ? » est loin d’être aussi simple que de checker une liste de symptômes. Il est très important de comprendre :

  • que ces diagnostics sont compliqués (bien plus que le résumé que nous venons d’en faire !) ;
  • que chaque maladie est propre à chacun ;
  • et que ces différentes maladies peuvent se mélanger.

« Chaque personne qui souffre d’un trouble, quel qu’il soit d’ailleurs, souffre de son propre trouble qui s’est constitué avec son propre puzzle personnel. »

« Le poids, il est important, parce qu’on fait les diagnostics [se font] aussi par rapport aux IMC, mais en même temps, comme on vient de le dire : il y a des troubles qui sont atypiques, et du coup, on ne rentre pas forcément dans les cases. Pourtant, on souffre. »

Quels sont les TCA atypiques ?

En plus des TCA principaux, il existe des troubles alimentaires moins connus mais tout aussi sérieux.

On peut notamment citer l’anorexie (ou autre TCA) atypique, très importante à connaître pour éviter de tomber dans les idées reçues.

« Il y a d’autres formes dites atypiques […]. Par exemple : l’anorexie mentale à poids normal. [Une personne souffrant] d’anorexie mentale à poids normal, c’est une personne qui va se restreindre, qui va avoir des préoccupations autour du poids, de son corps, de son alimentation […], qui va chercher à perdre du poids. Mais malgré tout ça, ils ne vont pas être à un poids en dessous de la norme. Alors des fois, ils sont en-dessous de leur poids physiologique. »

On peut également citer :

  • le mérycisme ;
  • le pica ;
  • les ARFID (Avoidant/Restrictive Food Intake Disorder).

Je vous invite à écouter l’épisode en entier si vous désirez en savoir plus sur ces troubles alimentaires spécifiques.


Nous vous conseillons aussi :

(Cet épisode évoque également des ARFID ! 😉)


Qu'est-ce qu'un TCA ? Entretien avec un médecin psychiatre

Qu’est-ce qu’un TCA ? | 10 idées reçues passées à la loupe

Une bonne façon de savoir ce qu’on veut, c’est de commencer par lister ce qu’on sait ne pas vouloir ! Je vous propose de reprendre cette idée pour aller plus loin. Qu’est-ce qu’un TCA ? Après ces définitions, Camille et moi avons échangé sur les 12 idées reçues suivantes, pour lister ce que les TCA ne sont pas.  

1 – Les jeunes filles qui souffrent d’anorexie ne veulent pas devenir des femmes.

La réponse est simple : ça peut être vrai tout comme ça peut être faux. Ça dépend et il faut absolument éviter toute généralisation.

« Ça peut être le cas, comme ça peut ne pas être le cas […]. Effectivement, il y a des patients […] qui ont beaucoup de difficultés avec la féminité, avec l’idée d’avoir un corps de femme, de devenir adulte, de devenir responsable… Et ce n’est pas forcément la même chose ! Ce n’est pas forcément la féminité, le fait d’avoir des formes féminines. C’est aussi le fait de devenir responsable, de devenir autonome, de quitter les parents. Ou encore de commencer un travail actif dans la société, de gagner sa vie. Ça peut être vraiment plein de choses. Ou de devenir parent […]. Il y en a qui ont ces difficultés-là […]. Comme des fois, on n’a absolument pas cette problématique-là d’avoir des formes, de devenir femme. Parfois, ce n’est vraiment pas la question. »

2 – Les jeunes filles qui souffrent d’anorexie veulent juste attirer l’attention

Malheureusement, c’est faux. Ce serait sans doute plus simple à gérer, mais il s’agit bien de maladies mentales, qui peuvent être très graves et entraîner beaucoup de souffrance.

« C’est peut-être plus facile, finalement, de se dire que c’est une crise d’ado, que c’est un caprice, que c’est quelque chose qui va passer, que [de se dire :] non, c’est une maladie. Et c’est vrai que ça impacte énormément l’ensemble de la famille ! »

3 – L’anorexie concerne les adolescentes de milieux sociaux favorisés

« Alors oui, dans les milieux favorisés, effectivement, on retrouve des troubles alimentaires, de l’anorexie mentale, pas mal, de la boulimie nerveuse. Mais en fait, non : ça concerne tous les milieux. Et puis […] ça ne concerne pas que les adolescents, même si c’est le pic de prévalence principal pour l’anorexie et la boulimie nerveuse, par exemple. L’hyperphagie boulimique, c’est un peu plus tard […]. Ça concerne vraiment tout le monde, et même des milieux très précaires. »

4 – Tous les mannequins souffrent d’anorexie

« Peut-être […]. Je n’espère vraiment pas. Déjà, il n’y a pas que l’anorexie mentale. S’il souffre de troubles alimentaires, ça peut être aussi d’autres, parce qu’il y a la boulimie aussi qui peut être présente dans ces populations-là […]. C’est un milieu clairement à risque, comme tous les milieux, les sports dits esthétiques, la danse, le patinage artistique, la natation synchronisée. »

5 – Les personnes qui souffrent d’anorexie sont très maigres

Cette idée reçue-là, on en a déjà parlé plus haut, avec l’anorexie atypique notamment. On va le répéter : si, on peut tout à fait souffrir d’un TCA même si on a un poids dans la norme.

« C’est important d’en parler, clairement, parce qu’il y a des personnes qui souffrent, qui ne sont pas dénutries, qui ne sont pas en dessous d’un poids dit « normal », et qui ne se sentent pas légitimes, du coup, à aller consulter. »

6 – On est guéri·e de l’anorexie quand on retrouve un poids normal

« Retrouver son poids de forme dans l’anorexie mentale, c’est pour moi le pilier du soin. C’est la base. C’est vraiment indispensable. C’est indispensable pour aller mieux. Mais par contre, ce n’est pas la seule chose qui est nécessaire pour guérir […]. On a une vision de son corps qui s’améliore quand même avec la renutrition. On est plus capable de faire des psychothérapies quand on est renutri·e […]. Les symptômes dépressifs, qui sont extrêmement présents et intenses quand on est dénutri·e, pareil : ils s’améliorent avec la nutrition. »

7 – Les personnes souffrant de TCA ne prennent pas de plaisir à manger

« Dans les trois entités principales, là, souvent, les patients disent : « Mais en fait, j’adore manger. J’aime manger, ça me plaît de manger ! ». Ce n’est pas la question du plaisir, c’est la question des interdictions liées à la maladie, la culpabilité qu’on peut avoir. »

8 – Il faut un déclic pour guérir

À ce sujet, il peut être intéressant d’écouter les nombreux témoignages déjà disponibles sur « La pleine conscience du pouvoir ». Si on retrouve souvent des tournants, des prises de conscience, des moments clé, etc., on ne retrouve jamais de déclic qui a suffi à lui-seul.

« Pour moi, c’est vraiment nécessaire que la personne prenne la décision, sans attendre un déclic, prenne la décision de se prendre en charge et de se donner les moyens, finalement, pour lutter contre cette maladie. »

9 – Les TCA ne concernent que les personnes en surpoids ou en sous-poids

« Non, non, ça concerne vraiment tout le monde, tous les types de poids, tous les IMC. Ça fait partie des critères diagnostiques, c’est sûr. En fonction de l’IMC de la personne, effectivement, on ne va pas parler des mêmes diagnostics. Mais ça ne change rien, au final. On parle de troubles alimentaires et de souffrance et de nécessité de soins. »

10 – L’hyperphagie, c’est un manque de volonté

« C’est effectivement aussi très très fréquent d’entendre ça, que l’hyperphagie boulimique, du coup, ne serait pas une maladie. Ce n’est pas une question de volonté, encore une fois : c’est une maladie […]. La seule chose que je pourrais mettre un petit peu en lien avec la volonté, c’est la volonté de mettre en place des soins et ça, c’est important. »

11 – Si on ne contrôle pas son alimentation, on va manger n’importe quoi 

C’est à la fois très simple et très compliqué… mais non, c’est l’inverse.

« Plus je vais contrôler mon alimentation, l’intellectualiser, vouloir absolument la faire rentrer dans des cases, m’interdire de manger certaines choses… et plus je risque d’avoir des pertes de contrôle alimentaire. »


Nous vous conseillons aussi :


12 – Jeûner, ça ne peut pas faire de mal, au contraire

Et bien… ça dépend. Ça dépend pourquoi on le fait, ça dépend comment on le fait, ça dépend si on souffre ou non d’un TCA ou d’une relation troublée à l’alimentation… Dans tous les cas : il faut faire attention avec les effets de mode et les méthodes miracles !

« On sait que dans certaines études, on retrouve des bénéfices [du jeûne intermittent] chez l’homme, mais surtout chez le rat, principalement. Et on sait aussi qu’il y a des études qui viennent dire l’inverse de cette étude-là. Il y a du pour et du contre. Ce n’est pas forcément très clair. Il y a même potentiellement une étude qui va sortir prochainement, dans le domaine de la cardiologie, qui montrerait que le fait de jeûner augmenterait les facteurs de risque cardiovasculaire. Il faut rester prudent par rapport à ce qu’on entend. »

*

J’espère que cet article aura répondu de façon claire à vos interrogations sur les troubles alimentaires. Pour aller plus loin dans cette réflexion autour de la question « Qu’est-ce qu’un TCA ? », je vous invite à écouter l’épisode en entier. Il vous amènera un certain nombre de précisions et de nuances !


Nous vous conseillons aussi :


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Téléchargez le guide de tous les épisodes du Podcast

Besoin d’aide pour trouver l’épisode de podcast que vous cherchez ? 

Le guide des épisodes de podcast

Besoin d’aide pour trouver l’épisode de podcast que vous cherchez ? 

💬 Besoin d'infos supplémentaires ?