Se motiver à bien manger est une préoccupation pour beaucoup de gens. Pourtant, avoir une alimentation saine, et la conserver sur la durée ne ressemble sans doute pas à ce que vous croyez ! Les conseils nutritionnels sont particulièrement nombreux, le discours ambiant est culpabilisant, la culture des régimes nous fait confondre le fait de manger sain et le fait de maigrir, le tout sans prendre en compte notre plaisir ni les effets psychologiques engendrés par les interdits et la restriction cognitive.
Dans ce contexte, comment s’y retrouver et arriver à une alimentation à la fois saine, mais aussi en lien avec ce qui est important pour nous ? Dans cet article, je vous propose de prendre conscience du volume sonore de la « police de la nourriture », puis d’explorer des pistes pour tendre vers une notion du « manger sain » qui soit respectueuse de vos besoins nutritionnels, mais aussi de vos envies et de vos valeurs.
L’omniprésence de l’injonction de manger sainement
Dès que le printemps revient, nous sommes très nombreux·ses à (re)tomber dans le piège de la culture des régimes. Qui n’a pas déjà essayé de se motiver à bien manger, à « faire attention », dans l’espoir de perdre du poids ?
« Combien de fois sommes-nous tombés dans le piège du régime printanier ? De l’espoir que nous allions obtenir notre silhouette idéale ou nous en approcher enfin cette année ? Combien de fois avons-nous échoué, pensant que c’était de notre faute et de notre manque de volonté ? Et qu’est-ce qui peut bien nous motiver à recommencer encore et encore à y croire ? À nous dire que cette fois-ci, c’est la bonne ?
En prenant du recul et en sortant de ce culte de la minceur et de cette lutte contre notre poids, nous pouvons trouver ça insensé. Mais, pour autant, nombre de personnes restent coincées dans ce cercle infernal des régimes, de la perte puis de la reprise de poids. »
Spontanément, vous pensez peut-être que j’exagère, que je grossis le trait ? C’est normal : les injonctions relatives à notre alimentation et à notre poids sont tellement omniprésentes que nous avons profondément intégré la plupart d’entre elles. Elles sont pourtant si nombreuses…
« Le programme est particulièrement injonctif : mangez ceci ! Ne mangez pas cela ! Un peu de volonté, il faut supprimer le sucre ! Ne manger qu’une fois par jour est une bonne idée ! Le gras est mauvais pour la santé. Mangez 5 fruits et légumes par jour, mais pas plus de 2 fruits parce que c’est du sucre. Vous êtes une mauvaise personne, sans moralité parce que vous n’avez pas mangé de céréales complètes cette semaine ! […] La culture des régimes nous poursuit partout : dans les médias, chez le médecin, en famille, entre amis. Tout le monde a son mot à dire sur ce que vous devriez manger ou pas. »
Se motiver à bien manger avec l’alimentation intuitive
Une fois qu’on a pris conscience de ça, on comprend pourquoi il est si difficile de se motiver à bien manger et de tenir cet engagement sur le long terme. Les règles sont si nombreuses qu’elles créent de la pression, complexifient l’acte alimentaire, engendrent de la culpabilité… Sans parler du fait qu’elles sont parfois contradictoires entre elles.
Si vous souhaitez aller plus loin, ce sont des sujets qui ont déjà été abordés sur « La pleine conscience du pouvoir », dans les épisodes :
- 9 sur les dangers des régimes ;
- 51 sur la cacophonie des recommandations et informations nutritionnelles.
Pour retrouver un rapport réellement sain et apaisé avec l’alimentation (et donc, pour régler ce problème de motivation à bien manger), je vous propose, dans cet épisode, de vous pencher sur le 4e principe de la thérapie d’alimentation intuitive.
« Voici comment Evelyne Tribole et Elise Resch, les créatrices de l’approche, décrivent ce 4e principe dans le manuel de l’alimentation intuitive :
« Opposez-vous aux pensées qui vous disent que vous êtes « bon » parce que vous avez mangé peu de calories ou « mauvais » parce que vous avez mangé une part de gâteau au chocolat. La police de la nourriture surveille les règles déraisonnables que la culture des régimes a créées. Le poste de police se trouve au plus profond de votre esprit, et son haut-parleur hurle des critiques, des phrases démoralisantes et des accusations qui vous font culpabiliser. Pour revenir à une alimentation intuitive, il faut absolument faire taire cette police de la nourriture. »
En somme, il s’agit d’observer vos pensées, afin de faire la part des choses entre d’une part, la parole de la « police de la nourriture », que j’aime aussi appeler « Radio régime » et d’autre part, vos réels besoins et envies.
Pour celles et ceux qui s’inquiètent de la place accordée à la nutrition (car oui, c’est quand même important) dans l’alimentation intuitive, je vous conseille les épisodes :
- 47 sur les 10 principes de l’alimentation intuitive en bref ;
- 57 sur les idées reçues autour de cette thérapie ;
- 9 sur la nutrition intuitive.
Bien manger en gardant sa motivation : mes propositions
Repérer la restriction cognitive
D’un point de vue concret et actionnable, qu’est-ce que vous pouvez faire si vous souhaitez vous motiver à bien manger, sans pour autant être écrasé·e par la culture des régimes et toutes ces injonctions alimentaires tous azimuts ?
Pour commencer, je vous propose « tout simplement » d’en prendre conscience et de repérer les moments où c’est la restriction cognitive (la vôtre et/ou celle de la société !) qui s’exprime.
« Une première étape peut être de voir ces pensées, ces règles, comme des croyances qui ne sont pas forcément vraies. De les questionner, d’en chercher les sources si elles existent. De comprendre d’où elles viennent et de vérifier qu’elles sont toujours d’actualité. En résumé : qui a dit ça, pourquoi, et est-ce fondé ? Parce que je ne sais pas si vous avez remarqué, mais en nutrition comme sur le sujet de la parentalité par exemple, tout le monde a son mot à dire et pense avoir une expertise, sans pouvoir pour autant citer ses sources. De même, ce qui est une croyance un jour peut voir son contraire advenir l’année suivante. Donc, informez-vous, et surtout auprès de réels experts et de vraies études scientifiques validées. »
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Accorder de l’importance à ce qui vous fait du bien et répond à vos valeurs
Ensuite, faite plus de place à ce qui vous fait du bien et à ce qui répond vraiment à vos valeurs. Prenez un temps pour questionner votre rapport à l’alimentation. Qu’est-ce qui est vraiment important, pour VOUS ?
Est-ce réellement d’être mince ? Ou bien est-ce plus important de manger sans que chaque repas ne soit une charge mentale ?
Est-ce que profiter pleinement et sereinement des repas en famille est un besoin que vous ressentez et auquel vous répondez suffisamment ?
Est-ce que toutes les règles alimentaires que vous suivez prennent soin aussi de votre santé morale, mentale ? Est-ce que votre alimentation vous apporte aussi de la joie, et pas seulement de « bons nutriments » ?
Y a-t-il des recommandations alimentaires que vous suivez à contrecœur parce que vous les avez toujours entendues, mais sans vraiment savoir si elles sont fondées ?
Varier votre approche du « manger sain »
Enfin, pour conserver sa motivation à manger sain, on peut aussi ajuster ce qu’on entend par là. Nous l’avons vu : la « police de la nourriture » repose parfois sur des idées reçues, ou sur une vision de la nutrition dont le manque de nuance est, en fait, néfaste pour la santé mentale.
Au lieu de n’écouter que cette voix de « Radio régime », je vous propose de laisser aussi la parole :
- au « conseiller en nutrition » ;
- à la « rebelle des régimes » ;
- et à votre propre bienveillance !
« [Le « conseiller en nutrition »], il s’appuie sur toutes les règles de la nutrition. C’est le roi du « manger sain ». Le dictateur qui conduit certains jusqu’à l’orthorexie […].
Cette voix peut être difficile à identifier, parce qu’elle donne des règles de santé, de bon sens, d’alimentation saine. […]
Cette voix va devenir un allié le jour où vous aurez fait taire la police de la nourriture. Parce qu’alors, elle deviendra l’alliée de la nutrition, qui vous permettra, et c’est ce que propose le 10e et dernier principe de la thérapie d’alimentation intuitive, de faire des choix alimentaires en accord avec vous et vous seul, basés sur la santé et la satisfaction et non plus sur la privation ou le régime. »
« Une autre voix fait beaucoup de bruit dans votre tête, c’est celle de la rebelle des régimes. Ce sont toutes les pensées qui veulent ruer dans les brancards face à celles de la police de la nourriture ou du conseiller en nutrition […].
Cette part de rebelle se déclenche face à vos propres pensées, mais aussi, en réaction aux remarques que pourraient vous faire des personnes extérieures :
- « Tu ne devrais pas te resservir. » ;
- « Tu ne crois pas que tu as assez mangé de gâteau ? » ;
- « Tu es sûre que c’est bon pour toi ? », etc.
Toutes ces remarques vous invitent à challenger une part de vous qui pourrait, plutôt que de se retourner contre vous, apprendre à poser vos limites, et à ne plus laisser les autres commenter vos comportements avec l’alimentation. Et là, cette voix rebelle peut devenir une alliée : en mettant l’énergie qu’elle engendre à votre service, en vous aidant à poser un cadre pour vous protéger. »
Enfin, sur ce sujet comme sur bien d’autres, nous gagnerions tous à faire plus de place dans notre vie pour l’auto-compassion.
« Celle qui nous aide à prendre soin de nous. Ce discours intérieur qui va nous faire du bien, qui va nous encourager plutôt que de nous blâmer. »
Nous vous conseillons aussi :
- Autocompassion en pleine conscience et alimentation | Entretien avec Leïla Kadi Louche
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Si vous faites partie de ces nombreux·ses personnes qui, à cause de la culture des régimes, cherchent désespérément la bonne méthode pour se motiver à bien manger, j’espère que cet article vous aura aidé à apporter de la douceur et de la souplesse sur cet objectif. Pour aller plus loin, je vous propose d’écouter l’épisode en entier : les notions de cet article y sont plus détaillées.
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