Dans ce nouvel article de mon podcast sur l’alimentation, « La pleine conscience du pouvoir », nous allons parler d’aménorrhée et d’anorexie. Il existe différents types d’aménorrhée, avec diverses causes. L’aménorrhée hypothalamique est un des effets que peut engendrer l’anorexie, ou plus largement une relation restrictive avec l’alimentation. Malheureusement, elle n’est pas toujours bien diagnostiquée, et même quand elle l’est, la réponse apportée n’est pas toujours adaptée… Dans cet épisode, je reçois Florence Gillet, fondatrice de « Beyond Body Image », qui a participé à la publication du livre de référence « Je n’ai plus mes règles ». Ensemble, nous avons échangé sur la définition et les causes de l’aménorrhée hypothalamique, sur les solutions naturelles possibles, sur l’arrivée (et la sortie !) de l’aménorrhée et de l’anorexie dans la vie de Florence… Dans cet article, je vous offre un résumé de tous ces éléments.
Aménorrhée hypothalamique : définition
L’aménorrhée : l’absence de règles
Pour commencer, faisons le point sur l’aménorrhée, et plus spécifiquement sur l’aménorrhée hypothalamique.
« L’aménorrhée, c’est l’absence de cycle menstruel chez des personnes qui sont censées avoir un cycle menstruel. »
Elle peut avoir plusieurs causes :
- la grossesse ;
- un dérèglement hormonal ;
- un problème de thyroïde ;
- la prolactine (l’hormone de l’allaitement) ;
- un problème physiologique…
L’aménorrhée hypothalamique
Lorsqu’il y a un lien entre aménorrhée et anorexie, il s’agit d’une aménorrhée hypothalamique. Dans cet épisode, Florence nous explique ce dont il s’agit.
« Cette aménorrhée hypothalamique, elle fonctionne sur un diagnostic d’exclusion. On exclut les autres raisons potentielles de ne pas avoir de cycle. Et pourquoi elle s’appelle hypothalamique ? C’est parce qu’en fait, elle vient de l’hypothalamus. C’est une petite glande qu’on a dans le cerveau, qui fonctionne un petit peu comme un centre de contrôle, qui reçoit des signaux du corps et des signaux hormonaux en fonction de comment on vit, comment on mange, comment on bouge, etc. Et qui, à son tour, du coup, juge de la disponibilité énergétique dans le corps. Pour faire simple, en fait, elle juge combien on a d’énergie disponible pour faire fonctionner toutes les fonctions du corps. En fonction de ça, elle envoie des ordres aux différents organes et aux différentes hormones dans le corps. […] Normalement, il déclenche un signal qui va à l’hypophyse, une autre glande du cerveau, et l’hypophyse, elle, déclenche le travail des organes sexuels. […]
Cet hypothalamus, il réagit de manière négative à un déficit énergétique chronique. […] Le déficit énergétique, […] c’est ça qu’on cherche à atteindre pour perdre du poids. Mais ce qui se passe, c’est que si on est dans ce déficit chronique d’énergie, il y a un moment où l’hypothalamus décide : « Nous n’avons pas assez d’énergie disponible pour faire fonctionner des fonctions non-essentielles à la survie. ». La fertilité est une de ses fonctions. »
Une fois qu’on a compris ça, on comprend pourquoi il y a un fort lien entre ce type d’aménorrhée et l’anorexie… ou même avec les TCA (trouble des conduites alimentaires) et avec les relations troublées avec l’alimentation de manière générale.
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Les causes de l’aménorrhée hypothalamique
La relation à l’alimentation et au sport
Si vous écoutez l’épisode en entier, vous comprendrez combien les causes de cette aménorrhée peuvent être complexes. Sur le principe, ça peut paraître simple : le déficit énergétique est trop important sur une trop longue période, donc le corps manque d’énergie et stoppe des fonctions non-vitales. On peut donc facilement comprendre que l’aménorrhée et l’anorexie peuvent être liées en raison :
- d’une alimentation insuffisante ;
- et/ou d’une pratique sportive trop importante.
Le stress
Cependant, il faut aussi savoir que le stress joue également un rôle… Et par « stress », nous incluons aussi, par exemple, la production de cortisol générée par certaines activités cardio.
La perte de poids (importante ou non)
La notion de perte de poids dans les cas d’aménorrhée hypothalamique – de même que dans l’anorexie – doit être pris avec des pincettes. Nous en avons déjà parlé dans « La pleine conscience du pouvoir », mais Florence et moi tenons à le redire : on peut souffrir d’anorexie sans être hyper maigre. Il en est de même pour l’aménorrhée hypothalamique.
« On peut avoir perdu du poids et pas forcément beaucoup. Je ne parle pas de perte de 100 kg, ça peut être même 3-5 kg.
– C’est important que tu précises ça. Là aussi, c’est loin des clichés qu’on peut avoir sur une restriction dans l’anorexie diagnostiquée. Ça peut commencer avec peu de kilos, finalement. »
La génétique
Le facteur génétique a également une grande importance.
« Notre hypothalamus a une sensibilité différente d’une personne à l’autre. Et d’ailleurs, c’est pour ça que l’aménorrhée hypothalamique ne fait plus partie des critères de diagnostic de l’anorexie. Pendant longtemps, on disait que, pour être anorexique, il fallait avoir perdu son cycle menstruel… Jusqu’au moment où on s’est rendu compte qu’il y a des femmes qui sont dans une anorexie très sévère qui néanmoins maintiennent leur cycle menstruel. Pourquoi ? C’est vraiment purement génétique […]. On n’est pas toutes égales devant le déficit énergétique et comment le corps arrive à y répondre. »
L’aménorrhée et l’anorexie dans la vie de Florence
Maintenant qu’on en sait un peu plus, voyons comment aménorrhée et anorexie sont rentrées dans la vie de Florence. Bien avant de sombrer dans les TCA, Florence a eu une enfance qui constituait un terreau parfait pour ces maladies : chaotique, pleine d’épreuves, dénuée de modèle parental équilibré, notamment dans leur gestion des émotions…
Mais tout a basculé pour elle lorsqu’il a été question de mariage. Elle venait de déménager dans un autre pays et se retrouvait donc assez seule, avec tout à refaire.
« J’allais me marier. Ça, c’est le truc qui m’a vraiment mise sur la voie des régimes. J’ai commandé ma robe de mariée à peu près un an avant de me marier. À cette époque, je me souviens que je me suis dit : « Bon, maintenant, je ne peux plus bouger. Je ne peux pas changer. ». Ce qui est représentatif, culturellement, des idées qu’on se fait […]. Je ne sais pas pourquoi je m’étais mis en tête que c’était mon corps qui devait se maintenir, et pas, en fait, la robe qui devait s’adapter à moi… »
Pour autant, Florence n’est pas tombée du jour au lendemain dans l’anorexie et les régimes restrictifs. Elle cite notamment la campagne « 5 fruits et légumes par jour » comme étant un des points de départ…
Pour appréhender l’histoire de Florence, que ce soit au travers de son aménorrhée ou de son anorexie, je vous invite vraiment à écouter l’épisode en entier. Vous comprendrez mieux tout ce qui peut amener à ce type de situation, ce qui ça implique, tous les aspects de soi ou de sa vie qui peuvent être concernés.
« Si j’explique tout ça, c’est parce que je pense qu’il y a beaucoup de gens qui vont se reconnaître… Quand on va un peu plus loin que la surface de « avant, j’avais des problèmes, maintenant je n’en ai plus », c’est très profond, en fait. C’est presque identitaire. »
Les réponses généralement apportées à l’aménorrhée hypothalamique
Face à l’aménorrhée hypothalamique, en France, plusieurs difficultés se posent. Tout d’abord, le diagnostic n’est pas toujours correctement posé. Et même quand il l’est, il n’est pas toujours clairement donné et expliqué à la patiente. Il est fréquent que des médecins ne donnent pas précisément le terme d’aménorrhée hypothalamique, ne conseillent pas spécialement de manger plus et de faire moins de sport…
« Elles sont dans une errance médicale énorme parce qu’en fait, parfois, on leur dit « ce n’est pas grave », donc quelque part, elles ne s’en inquiètent pas. Mais c’est grave. Le cycle menstruel, dans la vie d’une femme, en fait, c’est un signe vital. C’est ce qu’on considère comme le cinquième signe vital. »
Bien sûr, il arrive aussi que le diagnostic soit rapidement et correctement posé… mais que les solutions proposées soient :
- reprendre la pilule pour avoir des règles (alors que, rappelons-le : les règles obtenues grâce à la pilule sont artificielles) ;
- bénéficier de la PMA en cas de désir d’enfant.
C’est d’ailleurs ce qui a été proposé à Florence, mais vous découvrirez dans l’épisode comment les choses se sont déroulées pour elle… 😉
Un traitement à base d’hormones de substitution peut aussi être proposé pour protéger les os. En effet, il faut savoir que l’aménorrhée et l’anorexie peuvent aller de pair avec (entre autres maladies) l’ostéoporose.
« Quand le corps n’a pas assez d’énergie pour faire des fonctions qui sont non essentielles, c’est là où on commence à avoir un certain nombre de problèmes, pas seulement de fertilité. J’ai [aussi] parlé de la densité osseuse, qui est le gros souci de l’aménorrhée hypothalamique. En fait, on peut se retrouver dans une situation d’ostéoporose très très jeune. […] Vivre avec une ostéoporose, c’est littéralement mettre le pied pas tout à fait droit sur un trottoir et se casser le pied. C’est se taper la main contre un tiroir et se casser la main. Ça rend nos os vraiment ultra fragiles et c’est hyper handicapant au quotidien. »
Comment la méthode All in et l’alimentation intuitive se complètent face aux TCA
Réapprendre à nourrir son corps
Heureusement, il existe une autre solution que la PMA ou la pilule pour celles qui souhaitent retrouver leurs règles naturellement et sortir de l’aménorrhée. Il s’agit de la méthode All in, dont Florence est l’une des ambassadrices en France. Et bonne nouvelle : cette méthode (totalement naturelle) a largement fait ses preuves.
« Je dirais qu’aujourd’hui, même si, officiellement, la méthode dit « 6 mois en moyenne », moi je pense que ça descend plutôt vers les 3-4 mois. On sait aujourd’hui qu’il y a 98 % de succès avec cette méthode. »
Pour bien appréhender ce en quoi consiste la méthode All in, je vous conseille d’écouter l’épisode et de faire un tour sur le site et le compte Instagram de Florence. Cependant, nous pouvons dire qu’en résumé, il s’agit de lâcher le contrôle, de recommencer à se nourrir correctement et diminuer (voire supprimer) le sport – seulement pendant un temps 😉. Le but étant de fournir une ligne de conduite pour redonner de l’énergie à son corps.
« All in vient du terme de poker [qui parle] de mettre tout ce qu’on a sur la table, donc de ne pas retenir. [C’est] quelque chose [qui implique de] vraiment tout donner. C’est un peu ce qu’on leur demande en guérison : c’est vraiment de ne pas garder une forme de restriction quelque part, de vraiment lâcher prise sur tout ça. »
Tout cela étant, bien sûr, réalisé dans un certain cadre, avec un accompagnant, et uniquement avec des personnes dont la situation le permet. Florence a été très claire sur ce point lors de notre échange : chacun de ses accompagnements commence par un échange de 30 minutes ayant notamment pour vocation de vérifier qu’il ne s’agit pas d’un TCA nécessitant l’intervention d’une équipe médicale pluridisciplinaire.
Travailler son rapport à son image corporelle
Néanmoins, et Florence peut en témoigner personnellement, nourrir suffisamment son corps pour le sortir d’un trop grand déficit énergétique, cela peut ne pas suffire, à long terme. Nous l’avons vu : ce type d’aménorrhée et l’anorexie sont très liés. Or l’anorexie, même si on l’oublie facilement pour se concentrer sur la nourriture, est une maladie mentale. Elle est surtout liée au rapport que l’on a avec soi-même, de manière générale et avec son corps en particulier.
« Des années plus tard, après que j’ai retrouvé un cycle sans jamais travailler mon côté psychologique et mon image corporelle, forcément… Qu’est-ce qu’il s’est passé ensuite ? J’ai rechuté. J’avais fait le travail de retrouver des cycles, donc de manger plus, de me reposer plus […], mais je n’avais pas changé ma vision de l’importance de l’apparence, de ce que ça voulait dire le poids, de comment s’alimenter vraiment de manière équilibrée… Et donc et bien, à la première occasion, je suis retombée dans les troubles du comportement alimentaire. »
Pour que les résultats soient pérennes, il est important de réapprendre à prendre soin de son corps, mais aussi de se pencher sur ce qui nous a fait en arriver là. Il est important de travailler son image corporelle et son rapport au corps, son estime et son amour de soi, sa confiance en soi, son rapport aux autres, ses valeurs et envies profondes…
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Allier méthode All in et alimentation intuitive
Et c’est notamment là que la complémentarité entre méthode All in et alimentation intuitive se dévoile.
« Pour moi, l’objectif c’est que mes clientes, après la sortie de l’aménorrhée, elles aillent vers l’alimentation intuitive. On partage avec l’alimentation intuitive les valeurs, par exemple, de rejet de la culture des régimes ou du culte de la minceur. […] Mais, par contre, c’est vrai que, quand on est vraiment dans le diagnostic de l’aménorrhée hypothalamique, on ne va pas tout de suite pouvoir mettre l’alimentation intuitive en place de la même manière, je vais dire, qu’une personne lambda qui aurait des cycles. »
L’absence ou la trop faible quantité de masse grasse et les effets du déficit énergétique chronique (tels que, par exemple, l’altération des capacités cognitives) empêchent les signaux corporels de s’exprimer correctement. Quand on souffre d’anorexie, il est tout à fait possible de ne sincèrement pas ressentir de sensation de faim, même si le corps a désespérément besoin d’être nourri. Il est important (et c’est également préconisé dans l’alimentation intuitive face à ce type de TCA) de passer en premier lieu par une phase de renutrition (encadrée par un professionnel).
Ce n’est qu’ensuite qu’un réapprentissage des signaux de faim et de satiété pourra être fait et donc, que l’alimentation intuitive pourra être mise en place.
« Je pense que les valeurs profondes de l’alimentation intuitive et d’All in sont les mêmes. Mais, par contre, tant qu’on est dans un déficit énergétique chronique, on ne va pas pouvoir faire confiance aux sensations de faim et de satiété. Et donc oui, tant qu’on n’a pas au moins 3 cycles consécutifs, qui sont d’une durée relativement acceptable, […] on ne va pas pouvoir faire confiance complètement à ces sensations-là. Il va falloir être plus dans une notion de système, de plan où on dit : « je mange toutes les 3-4 heures sans m’interrompre parce que mon corps en a besoin à ce stade ». »
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J’espère que cet article vous aura permis d’y voir plus clair sur les liens entre l’aménorrhée et l’anorexie, ainsi que sur les solutions possibles. Pour aller plus loin, je vous encourage vivement à écouter l’épisode en entier. Il vous apportera plein de nuances sur les notions évoquées dans cet article. Je vous conseille également de découvrir l’univers de Florence Gillet. Et si vous ressentez le besoin de vous faire accompagner sur votre relation compliquée avec la nourriture, je vous propose de découvrir mon accompagnement Indépendance Cannelle.
Nous vous conseillons aussi :
- le site internet de Florence, Beyond Body Image
- le compte Instagram de Florence, @jenaiplusmesregles
- l’accompagnement Indépendance Cannelle